Lisez cette remarquable analyse publiée par le Sénateur Jean Germain le 16 février
2015 dans la revue Énergie
Sommes-nous enfumés par les éoliennes géantes ?
par Jean Germain, Sénateur (PS)
d’Indre-et-Loire et Vice-président de la commission des finances du Sénat.
Les éoliennes géantes, en tant que source
d’énergie propre, posent deux obstacles : elles fonctionnent de manière
intermittente ; elles sont chères. Alors que la première difficulté devrait
conduire à en faire un usage raisonné correspondant à des besoins spécifiques,
donc à implanter les éoliennes industrielles uniquement en lien avec une
activité qui peut se satisfaire d’une fourniture intermittente d’électricité,
la question s’est focalisée sur l’obstacle financier présenté comme un défi.
Il a été avancé qu’il fallait faire preuve
de volontarisme. En soi, cette approche n’est pas incompatible avec une
approche raisonnée. Mais l’arrivée massive de subventions, à travers un tarif
de rachat obligatoire financé par les factures d’électricité, a conduit à
évacuer la réflexion sur la pertinence de l’implantation des éoliennes. Une
forme de productivisme, consistant à vouloir implanter le plus possible
d’éoliennes industrielles, est devenue une fin en soi. Cette démarche est
défendue par des lobbyistes haut de gamme qui cajolent les pouvoirs publics et
que s’offrent les promoteurs éoliens grâce à la manne financière dirigée vers
eux et aux seules fins de la conserver le plus longtemps possible. La
contrepartie qu’ils offrent est-elle réellement examinée ? Elle consiste en des
mots : bonne conscience de faire reculer le nucléaire ou d’agir pour le climat,
emplois créés, fiscalité mise au service du monde rural.
Alors qu’une analyse plus poussée montre que
nombre de promoteurs éoliens sont liés à des sociétés pratiquant la spéculation
immobilière ou à des entreprises de transport routier, et que la préoccupation
du profit écrase complètement le souci de l’environnement, il est malheureux
que le parlement ne se saisisse pas plus des alertes qui sont lancées par des
associations, des chercheurs, des médecins mais aussi par la Cour des comptes
ou le service interministériel de prévention de la corruption.
Il faut reconnaître que la réflexion et
l’analyse semblent presque rabat-joie quand on considère un certain discours
d’opinion qui n’a même plus besoin d’être formulé : l’éolien est posé comme une
évidence, les images des éoliennes servent à illustrer tout article, tout sujet
grand public, sur les énergies renouvelables voire sur les énergies tout court.
Les éoliennes sont plus évocatrices qu’une image de laine de verre ou de double
vitrage. Même le site Internet du Sénat utilise un pictogramme représentant une
éolienne pour conduire à la page présentant les textes relatifs à l’énergie.
Mais est-on si certain que les gens y soient
favorables ? La somme des opinions individuelles dans la population est-elle à
l’unisson de l’opinion générale supposée ? Un temps, un sondage a été avancé
pour montrer qu’une grande partie de la population accepterait l’implantation
d’éoliennes près de chez elle. Mais, alors que, par définition, la masse
citadine des personnes sondées n’était pas concernée par l’objet de l’enquête,
l’acharnement du lobby éolien à obtenir des « simplifications » juridiques
limitant le plus possible les recours dont il dénonce la quantité, tout comme
son insistance à se voir transférer l’élaboration des décisions le concernant,
est un bon révélateur du rejet réel que suscitent les éoliennes industrielles.
Il est urgent de se saisir de cette question
et de ne pas se laisser bercer par les discours bien rôdés des professionnels
de la communication qui viennent dénoncer les blocages administratifs de notre
pays « que tout le monde connaît bien et qui empêchent la croissance » ou
réclamer « l’indispensable sécurisation des investissements », à l’occasion de
l’examen du projet de loi sur la transition énergétique.
Trois raisons peuvent être facilement
avancées pour interroger le système actuel.
1. Le retour de l’expérience allemande
montre qu’au niveau global, les éoliennes industrielles ne constituent pas une
source d’énergie de substitution. Les Allemands ont voulu fermer leurs
centrales nucléaires mais les éoliennes, qui ne fonctionnent en moyenne qu’un
quart du temps et pas quand on le souhaite ni quand on s’y attend, sont inaptes
à les remplacer. Alors les Allemands, conscients qu’ils devaient avoir une
capacité de production d’électricité à même d’alimenter leur pays sans l’apport
d’aucune éolienne, en période de pointe comme en période normale, ont relancé
les centrales à énergie fossile. Aujourd’hui, ils polluent le centre et l’est
de l’Europe. Il faut cesser d’aller trop loin dans l’impasse.
Du point de vue de l’utilité, ces éoliennes
industrielles ont toutes les caractéristiques de ce que l’on appelle un gadget.
Mais alors que le gadget est plutôt associé à l’image d’un objet qui tient dans
la main et que l’on place sur une étagère ou sur un bureau, l’idée ne vient pas
spontanément d’associer à ce concept des constructions visibles à des
kilomètres à la ronde, qui pèsent des centaines de tonnes et dont le coût
d’installation représente, pour chacune, l’équivalent de plusieurs années de
budget d’une commune rurale.
En même temps, il faut avoir à l’esprit que
non seulement les éoliennes telles que déployées aujourd’hui s’avèrent inutiles
comme énergie de substitution, mais que, comme elles sont censées avoir des
effets écologiques, l’exploitation des éoliennes s’accompagne de l’obtention de
certificats donnant des droits à polluer par ailleurs. Des holdings financières
l’ont bien vu, qui sont présentes sur ce secteur. Cela ne figure pas dans les
plaquettes avantageuses qui présentent les éoliennes sur de jolis fonds
bucoliques, au milieu des enfants et des vaches, ou sur de sympathiques dessins
aux couleurs pastel qui agrémentent des documents de travail.
2. Les éoliennes industrielles
consomment énormément d’espace en termes de pollution visuelle et sonore. Sans compter
l’enfouissement à jamais, à moins de deux mètres, de milliers de tonnes de
béton qui sont coulés en bloc pour constituer les socles destinés à soutenir
des éoliennes, c’est-à-dire des générateurs que font tourner des pales de six à
huit tonnes chacune à plus de cent mètres de haut.
La faiblesse de notre législation est
aberrante, qui n’impose qu’une distance de cinq cents mètres des habitations,
là où d’autres pays exigent au moins un kilomètre et demi et où les médecins
demandent que plusieurs kilomètres séparent les maisons des éoliennes
industrielles. Localement, les argumentaires des représentants de commerce
d’une « technologie innovante » est toujours le même, bien rôdé : avec cinq
cents mètres, la loi est respectée et les prochaines éoliennes à installer
seront plus performantes et moins bruyantes que celles de la génération
précédente. L’expérience montre la fausseté de ces arguments. Ce qui évolue
dans le temps, c’est la taille de ces engins, toujours plus hauts. L’UNESCO a
menacé de déclasser le Mont-Saint-Michel si des éoliennes industrielles étaient
implantées à moins de vingt kilomètres. Personne ne cherche à acheter une
maison qui serait proche d’une éolienne. Des décotes très importantes sont
observées, traduisant la diminution de la qualité de vie. Est-il apocalyptique
d’imaginer que demain des demandes de permis d’exploiter des gaz de schiste sur
ces mêmes terrains seront justifiées par le fait qu’ils sont déjà « sacrifiés »
?
Quand il n’y a pas de site classé, aucune
réglementation sérieuse ne protège les campagnes contre l’invasion des
éoliennes géantes. Faut-il que les paysages ruraux qui ne sont pas classés se
transforment pour leurs habitants en territoires où il devient infernal de
vivre, dans une ambiance de friche industrielle ou de bord d’autoroute ? Voir
une éolienne quelques secondes depuis sa voiture ou une heure le temps d’une inauguration,
ce n’est pas la même chose que de vivre à proximité toute la journée et toute
la nuit, toute l’année, pendant des années. Le milieu rural apporte une qualité
de vie incomparable. Ceux qui se plaignent de ses handicaps sont les premiers à
le reconnaître.
De plus, le tourisme est souvent un moteur
de l’économie locale et assure une indispensable diversité de revenus. Si les
premières éoliennes ont pu susciter la curiosité au début, ce temps est révolu.
Qui s’intéresserait à la Tour Eiffel s’il y en avait partout ? Au contraire,
quels sont parmi les urbains ou les périurbains, ultra majoritaires dans notre
pays, ceux qui iront se détendre en face des éoliennes ? Les éoliennes
pénalisent fortement le monde rural et le monde urbain dans leur relation de
complémentarité qui doit être au contraire développée.
Le rapport rendu par le sénateur Alain
Bertrand au début de l’été 2014 le rappelait et le Président de la République,
lors de ses vœux consacrés à la ruralité, le 17 janvier 2015, à Tulle, le confirmait.
À cet égard, il est intéressant de noter qu’il y a parlé de la nécessité de
développer les énergies renouvelables et a évoqué, prenant son département en
exemple, le photovoltaïque et les barrages hydroélectriques, mais qu’il s’est
bien gardé de revendiquer les éoliennes alors que plus de deux cents y sont en
projet dans les cartons des promoteurs qui invoquent le fait qu’il n’y en a
qu’une dizaine d’implantées. S’il pensait que l’éolien est une bonne chose,
l’aurait-il passé sous silence ?
Afin que des éoliennes aient une certaine
utilité pour contribuer à la satisfaction des besoins courants des ménages et
des entreprises en électricité, il en faudrait un nombre gigantesque, comme on
peut en observer dans le désert algérien ou dans le désert américain, ou les
placer dans des endroits régulièrement ventés et par ailleurs non peuplés comme
dans le sud de la France. Où, en France, en répartir le nombre jamais suffisant
? Qui peut sérieusement imaginer couvrir tout notre pays verdoyant, dont le caractère
des paysages a fait naître plus d’une vocation écologiste, avec ces engins à
côté desquelles les lignes à haute tension, qu’ils n’empêchent pas, paraissent
des insectes ?
On pourrait aussi parler des routes et des
carrefours disproportionnés mais indispensables pour faire passer les engins
spéciaux acheminant les éléments gigantesques des éoliennes, afin de les
livrer, de les réparer ou de les démanteler. Sans compter les tranchées
nécessaires aux raccordements. À cet égard, on a pu voir récemment un conseil
général, la Creuse, affronter ERDF au tribunal administratif, autour de la
question de savoir jusqu’à quel point ce dernier, qui subit l’obligation de
raccorder les éoliennes, doit aussi remettre tous les lieux en état. Il y a là
des contradictions flagrantes avec tous les efforts faits par ailleurs. La
physionomie de notre pays est en cause. Or, à l’heure actuelle, l’État n’a
aucune vision globale des projets en cours et se préoccupe juste, dans le
projet de loi de transition énergétique, de recenser les parcs éoliens
existant.
3. Un énorme gaspillage d’argent est
constaté. Peut-on se le permettre ? Il y a un an, la Cour de Justice de l’Union
européenne, interrogée par le Conseil d’État, a vu des aides publiques dans le
tarif d’achat obligatoire dont bénéficient les éoliennes, puisque ce qui est
prélevé sur les factures l’est à la demande de la puissance publique et est
affecté selon sa volonté. Il a fallu beaucoup de contorsions juridiques pour
que la commission européenne ne demande pas le remboursement des aides versées
depuis quinze ans au secteur éolien : la raison de fond n’était pas juridique
mais tenait à l’impossibilité matérielle de revenir en arrière. Est-ce une
raison pour continuer dans l’erreur ?
La Cour des comptes s’est émue de ce gaspillage
et des rentes non justifiées qu’il procure à certains.
À ce stade, il faut aussi noter que les
éoliennes sont pour la plupart importées, notamment de Chine, et que les
arguments de l’emploi créé en France nécessitent d’être vérifiés de près. Nous
construisons des pièces d’éoliennes, et nous pourrions toujours les fabriquer
pour des éoliennes à installer dans le désert. La réalité est que ce secteur
creuse le déficit commercial et que localement un parc éolien ne créé pas un
seul emploi. Il y a quand même quelques réparateurs qui vont de parcs en parcs,
car les engins paraissent tomber souvent en panne : mais alors que les
commerciaux exposent aux élus qu’il y a là un gisement d’emplois, les élus
ont-ils la curiosité de vérifier ce que les commerciaux disent aux
investisseurs à appâter ? Ils leur expliquent l’inverse, que le
perfectionnement incessant des machines permettra de limiter le recours à des
réparateurs et de faire des économies rendant le placement plus rentable. Il
est aussi avancé aux élus locaux que les investissements nécessités par la pose
des éoliennes créent des emplois au moins pendant un certain temps. Mais
pourquoi ne pas investir directement dans des travaux utiles, modernisant
réellement le pays et favorisant la qualité de vie pour le monde rural et
périurbain, les services et le tissu de PME ?
L’aberration des éoliennes rappelle la
nécessité de repenser l’investissement local comme la manière d’assurer les
ressources nécessaires des collectivités territoriales. L’inutilité globale des
éoliennes à lutter contre le réchauffement climatique ou à aider à fermer des
centrales nucléaires n’est pas aussi spontanément perceptible que l’inutilité
d’une autoroute sur laquelle ne circuleraient que quelques cyclistes. Pourtant,
que ne dirait-on pas si des bouts d’autoroutes inutilisées étaient construits
un peu partout au motif que les promoteurs sont subventionnés pour les
construire et qu’à tout prendre l’usage du vélo est ainsi favorisé ?
Au-delà du gaspillage d’argent qui pourrait
être restitué aux ménages ou consacré à l’investissement dans les
infrastructures ou dans le soutien à la recherche sur de réelles énergies
renouvelables, c’est-à-dire efficaces, on assiste à la réunion de conditions
qui enfantent des logiques quasi-mafieuses : des promoteurs construisent des
équipements qu’ils savent inutiles pour encaisser des subventions, recyclent
une partie de la manne pour créer des écrans de fumée et assurent localement le
système par le clientélisme. L’opacité est reine. Utilisant les vides
juridiques qu’ils ont réclamés, les promoteurs et leurs agents commerciaux
exploitent la pauvreté des territoires ruraux et de leurs populations pour «
enrôler » les propriétaires de terrains attirés par l’appât de quelques
milliers d’euros de loyers et les monter contre ceux qui n’en veulent pas.
Parmi ces propriétaires séduits, on compte de nombreux élus locaux. Le service
central de répression de la corruption s’est ému très clairement dans son
dernier rapport de la multiplication des situations de conflit d’intérêt et
alerte sur un phénomène massif.
De plus, ce service interministériel présidé
par un magistrat a invité les pouvoirs publics à s’interroger sur ce qu’il
appelle les « chartes d’étroite collaboration » que les promoteurs et les
commerciaux font voter par des conseils municipaux totalement désarmés
juridiquement pour évaluer les enjeux des engagements qu’ils prennent. L’effet
de ces délibérations est de verrouiller le débat en obtenant un consentement
préalable et juridiquement irrévocable des élus. On est très loin de la
démocratie de proximité. Ces engagements sont ensuite utilisés pour peser sur
les décisions des services de l’État et influencer les propriétaires fonciers.
Quel n’est pas alors le désarroi de certains élus à qui les promoteurs ont fait
croire que l’implantation d’éoliennes relevait pratiquement d’une délégation de
service public, puisque couvert par la loi, lorsque les mêmes promoteurs leur
demandent d’opposer le caractère privé des projets à ceux qui viennent s’en
plaindre. Outre une certaine peur du ridicule s’ils reviennent sur leur
position, les élus ruraux se trouvent donc pris entre la crainte d’être
attaqués en justice par le promoteur s’ils se ravisent, et l’angoisse de voir
leurs administrés, où ceux des communes alentour, les dénoncer pour prise
illégale d’intérêt.
L’information sur ces pratiques a fini par
circuler entre les associations qui se multiplient, tout comme l’information
sur la manière de stopper, grâce au pénal, ce qu’on ne peut plus contrer au
civil ou devant le tribunal administratif. C’est en effet le moyen qui leur
reste pour mettre fin à des projets puisque le lobby éolien a obtenu il y a
deux ans la suppression, portée par Delphine Batho, alors ministre de
l’environnement, du dispositif des « zones de développement éolien » (ZDE).
Ce dispositif consistait à conditionner les
subventions aux éoliennes aux résultats d’études sur les vents et sur
l’acceptabilité des projets, à partir de concertations préalables orientées par
le souci d’aménagement du territoire et l’évitement du mitage anarchique. Les
promoteurs et les commerciaux s’abritent maintenant derrière le respect des
schémas régionaux éoliens qui sont opposables. Mais, ces documents sont
beaucoup moins précis, plus approximatifs, notamment parce qu’il était entendu
qu’ils devaient seulement défricher le terrain pour les ZDE qui, elles,
devaient les préciser.
Les ZDE déjà validées devaient être
respectées après le changement de loi. Les études avaient coûté cher aux
collectivités. Certaines ZDE étaient sur le point d’être validées et, donc,
juridiquement les promoteurs n’étaient plus obligés d’en tenir compte depuis la
nouvelle loi. De fait, des promoteurs ont pu présenter des projets dans des
zones identifiées comme non favorables à l’occasion des études devant aboutir
aux ZDE. D’ailleurs, le lobby s’en vante quand il souligne la levée des «
contraintes » depuis 2013. C’est cela qu’il faut lire derrière la «
clarification du dispositif réglementaire » et les «dispositions économiques
plus favorables » qu’il se félicite d’avoir obtenues.
Si l’information généraliste sur l’énergie,
pour le grand public, utilise l’image des éoliennes, la presse quotidienne
régionale abonde désormais chaque semaine d’articles dénonçant l’arnaque que
représentent les éoliennes, la dégradation des territoires et les déchirements
des populations. Des mâts de mesure évalués à des dizaines de milliers d’euros
sont abattus, des menaces sont reçues aussi bien par des associations opposées
aux éoliennes que par des bureaux d’études chargés de préparer leurs
implantations. L’échauffement des esprits met à mal l’ordre public. Le sujet
transcende les clivages politiques. Un reportage sur les manipulations des élus
diffusé dans le journal télévisé de France 2 de 20h en octobre dernier a
également été très remarqué. Les élus ne comprennent donc plus ce qui se passe
et attendent du gouvernement et des parlementaires que la loi indique
clairement ce qui est souhaitable et les mette à l’abri de faire de faux pas.
Le Sénat, représentant des collectivités territoriales, est l’institution vers
laquelle ils tournent leur regard.
La réalité est qu’en matière d’éoliennes
industrielles, élus comme particuliers sont moins bien protégés par la loi que
ne l’est le consommateur par le code de la consommation qui impose aux
professionnels un devoir d’information, de mise en garde ou de conseil afin
d’éviter l’emballement. Et en fait de professionnels, il s’agit dans le secteur
de l’éolien de sociétés adossées à des multinationales ou de multinationales
elles-mêmes. Le rapport de force est-il si équilibré et les enjeux si
négligeables qu’une protection législative conséquente est à ce point superflue
? Un petit propriétaire foncier à qui on a fait signer une promesse de bail,
souvent contre rémunération, avec la promesse de percevoir de gros loyers, ne
risque pas de se faire une opinion objective en sept jours sur les nuisances
qu’il cause à des kilomètres à la ronde et de se rétracter dans le délai de
droit commun.
Il faut encore noter que l’obligation
d’achat de l’électricité éolienne désorganise le marché de gros de
l’électricité. Dès lors qu’il convient de maintenir en service les mêmes
capacités de production qu’il y ait ou non des éoliennes, les sommes qui
servent à acheter l’électricité éolienne sont autant de sommes qui manquent
pour mieux entretenir et moderniser les réseaux et des capacités de production
classiques et pourtant indispensables afin de garantir la fiabilité de
l’approvisionnement de chacun.
Peut-on se permettre de créer les conditions
économiques de la négligence ?
Il conviendrait d’inverser la logique. Au
lieu d’aider l’éolien par principe, avec l’obligation d’achat, le tarif de
rachat ou des compléments au prix du marché, il ne faut le favoriser que si les
projets ont une utilité avérée, c’est-à-dire s’ils permettent effectivement de
se passer du nucléaire ou des énergies fossiles pour certains usages, comme le
pompage ou des industries spécifiques, que s’il répond aux raisons pour
lesquelles on a spontanément envie de le soutenir, que si les éoliennes ne
viennent pas dénaturer un site où vivent et passent des gens. Ce serait
vraiment écologique. Plusieurs solutions existent, comme un exercice par l’État
de ses responsabilités en matière d’aménagement du territoire, soit directement,
soit en posant des règles très scrupuleuses.
Au Sénat, le 29 janvier 2015.
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